Archives & Dossiers du Poitou-Charentes

Prisonnier pour cause d'inventaire (Breuil Chaussée 1906)

 

Avec l’article, la page d’histoire consacrée aux inventaires de 1906. Va se renfermer. Ainsi s’achève un épisode très marquant pour le bocage…

 Avec 120 soldats et 80 gendarmes, l’inventaire fut rondement mené à Breuil Chaussée. Ce jour là, 5 mars 1906, six manifestants sont arrêtés et jugés le soir même, avec des peines variant de 10 jours à deux mois de prison ! A leur sortie de la maison d’arrêt, ils seront accueillis avec les honneurs lors de leur retour dans la commune : hommage du député (M. Savary de Beauregard) procession dans les rues, carillons de cloches…

Le 5 mars également, c’est brétignolles qui défendait son église. L’opération s’achèvera avec un semblant d’inventaire. Même chose à Clazay, où un habitant a accepté d’ouvrir les portes de l’église. Un chroniqueur catholique raconte ainsi la scène : «  Un homme de mauvaise vie, au regard déloyal, un traître, prétendit qu’on avait assez résisté et il alla ouvrir les portes, après avoir brisé les entraves qui les consolidaient. Je ne m’étonne pas de cette trahison : il a dans toutes les localités, des misérables 40 sous qui accomplissent les pires besognes à prix d’argent. »

En ce début d’année 1906, ces scènes d’inventaires vont aussi se multiplier dans le bocage. Malgré les résistances des manifestants, les églises du Temple, de La Chapelle-Largeau, de Moulins, de Beaulieu sous Bressuire finissent par ouvrir leurs portes aux représentants de l’état.

Dans d’autres communes, comme à Bressuire, Saint Porchaire, Noiterre, Noilieu ou Chambroutet, les fidèles se contentent de protester mais n’entravent pas le passage des gendarmes. D’autres localités réussissent à empêcher la « profanation » de leurs églises. Ainsi, l’inventaire de Combrand aura lieu un an plus tard, une fois les esprits calmés de part et d’autres.

De cette période, il reste des scènes cocasses. Ainsi, dans un chapitre consacré à la résistance de Boismé, un chroniqueur anonyme et catholique raconte :

« On envoya au sous préfet une missive galante signée : Marie. Le sous préfet, qui est à l’affût de ces occasions, enfourcha son cheval, détala au plus vite de Bressuire, et arriva dans le chemin creux désigné. Là au lieu d’une zizine ou d’une Georgette, il rencontra plusieurs gars robustes qui le rossèrent d’importance. Ils détachèrent aussi son cheval, qui reprit au galop la route de Bressuire, laissant son maître clopin-clopan… »

Mais ces inventaires furent aussi marqués par des affrontements très durs. Ce fut un miracle de ne pas dénombrer de victimes dans le bocage. Ailleurs, deux catholiques furent tués, en haute Loire et dans le département du Nord. A la lecture des archives sur ces inventaires menés dans le bocage, on est frappé par la détermination affichée par des catholiques qui appelaient les fidèles à aller jusqu’au sacrifice ultime pour résister « au juifs et aux francs-maçons, auteurs de cette loi scélérate ».

Fort heureusement, ce sacrifice ne fut jamais nécessaire…

                                                                                                                                Agir.

 

Article relevé dans la Nouvelle République du 24 avril 1999



31/08/2012
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