Archives & Dossiers du Poitou-Charentes

Né au Vigeant dans cette cité martyre de son Poitou qu’il aimait tant, Louis Toussaint compte maintenant parmi les nombreux héros que nous enleva la barbarie allemande. A peine âgé de 40 ans, à ce jeune professeur qu’il m’est permis ici d’honorer, puisque je fus son élève, un avenir certainement brillant s’annonçait. Diplômé des certificats d’études supérieure d’histoire moderne et contemporaine, de géographie et de littérature, Louis Toussaient avait pour ambition, bien légitime, d’accéder au professorat de lettres dans les écoles normales d’instituteurs.

Tous les élèves qui ont eu le bonheur de posséder un tel professeur se souviendront comme moi, sous l’apparence d’une sévérité qui s’imposait, de ses qualités de «　maitre　» et de son souci constant de justice. «　On travaillait　» avec M. Toussaint. On n’assistait plus à un cours, mais à une conférence où un jeune se mettait au service des jeunes. Il a pensé que sa jeunesse à lui, tout en continuant de la dépenser en faveur des enfants de son pays. Il se devait de la mettre une fois de plus au service de la France.

C’est ainsi que, de très bonne heure, il se mit en relations avec le groupe de résistance de Louis Renard. Comme ce héros, Toussaint n’est pas revenu. Arrêté, puis déporté, c’est en chantant la marseillaise qu’il fut exécuté à Wolsenbutten.

Avec l’exemple de Levrault, qui fut aussi son élève, c’est un peu de leur honneur qui rejaillit sur notre vieille école supérieure que je me refuse, quant à moi qui ne l’ai pas connue comme telle, d’appeler du nom de collège moderne.

Aux trois petits enfants qu’il laisse, à Mme Toussaint qui le pleure, j’adresse de la part de tous ceux qui l’ont connu et apprécié, l’expression de ma respectueuse sympathie.

C’est nombreux que ses anciens élèves se feront un devoir d’assister au service religieux célébré à sa mémoire le vendredi 15, à 10h, à la cathédrale de Poitiers.

R. Touraine.

Article relevé dans la Nouvelle République du 13 juin 1945.